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Gaman · Endurance

Image en noir et blanc de parents canado-japonais et leurs enfants dans les années 30.

Expulsion en masse

Pendant la Seconde Guerre mondiale, toutes les personnes d'origine japonaise vivant sur la côte ouest sont expulsées de leurs maisons et de leurs communautés. Peu importe leur citoyenneté, on leur confisque toutes leurs propriétés et possessions.

Transcription

[Une jeune femme et un homme en habits des années 40 tiennent des mallettes, superposées sur une photo d'archives de personnes montant à bord d’un train.]

Texte à l’écran : « Décembre 1941: Le Japon lance des attaques surprises à Hawaii et en Asie. Le Canada déclare la guerre au Japon – la vie des Canadiens japonais changera pour toujours. »

[Musique de piano atmosphérique]

>> La jeune dame, debout alors qu’elle porte une robe brune simple du style des années 40 avec un gilet, parle :

Débutant en 1942, le gouvernement du Canada force les personnes de descendance japonaise de se relocaliser en dehors de la zone interdite de 100 milles en Colombie-Britannique.

[Photos d'archives montrent : des personnes à bord d’un train et débarquant d’un bateau à vapeur à Kaslo en Colombie-Britannique, puis un campement dans les montagnes pendant l’hiver, plusieurs jeunes en rang portant un manteau d’hiver, et un campement fait de tentes improvisées et des cabanons comme maisons.]

>> Voix du jeune homme :

En 1943, le gouvernement autorise la vente forcée des propriétés des Canadiens japonais, laissant peu de choses à ces communautés en rentrant.

[Photo d'archives montrant une rangée de petites maisons à la base d’une montagne, et une autre photo montrant femmes et enfants.]

>> Voix de femme :

Après que la guerre avec le Japon se termine en 1945, les politiques gouvernementales créent un second déracinement qui empêche le retour des Canadiens japonais sur la côte ouest pendant un autre 4 ans.

[D’autres photos : des rangées de personnes à la gare de train, un campement avec un silo derrière, un train plein de passagers se préparant à partir.]

>> Le jeune homme, portant une casquette avec un chandail gris-bleu, des bretelles rouges et des pantalons rayés, commence à parler :

À la place, les Canadiens japonais ont été éparpillés à l’est des Rocheuses ou exilés au Japon, un pays que la plupart d’entre eux n’ont jamais réellement connu.

[Texte à l’écran : Photos d’archives
NMM 1994.69.4.29 Canadiens japonais dans le train
NNM 2012.20.5 Nasaokin en train de charger Kaslo
NNM 2010.49.1 Site d'internement de Popoff
NNM 1996.178.1.22 Enfants de maternelle, Popoff
NNM 2010.49.11 Tentes de Bay Farm
NNM 1994.69.4.27 Cabanes de Tashme
NNM 1994.69.4.16 Famille Oda à New Denver
NNM 2014.14.2.4.183 Camp autosuffisant East Lillooet
NNM 1996.178.1.30 En attendant l'exil, Slocan
NNM 1994.69.4.12 Maisons d'internés sur une ferme, Alberta
NNM 2012.11.3 Exilés dans le train, Slocan]

Image en noir et blanc d'un officier affichant un avis au mur, superposée de textures abstraites.

Les Canadiens japonais reçoivent l'ordre de remettre leurs propriétés au Bureau du séquestre des biens ennemis. Cela inclut leurs maisons, commerces, voitures, caméras et radios. Ceux-ci doivent être conservés en fiducie à titre de « mesure de protection » uniquement. La majorité des Canadiens japonais sont envoyés dans des camps d'internement et en « installation autosuffisante » en Colombie-Britannique centrale. Certains autres sont envoyés dans des champs de betteraves à sucre en Alberta et au Manitoba. Les hommes et les garçons plus âgés sont envoyés sur les champs de construction de routes, mais finiront par rejoindre leurs familles. Tous les hommes qui protestent sont envoyés dans des camps de prisonniers de guerre en Ontario. Exilés de leurs maisons, les Canadiens japonais persévèrent. Ils attendent le jour où le Bureau du séquestre des biens ennemis leur rendra leurs propriétés et possessions comme promis. Ce jour n'arrivera jamais.

Image en couleur d'une machine à écrire posée sur de vielles enveloppes à lettres éparpillées sur un fond blanc.

Dépossédés

Le sentiment de choc s’intensifie alors que le gouvernement commence à vendre les propriétés confisquées pour une fraction de leur valeur. Furieux et à la recherche de réponses, les internés écrivent des lettres de protestation.

En 1943, le gouvernement brise sa promesse. Il permet au Bureau du séquestre des biens ennemis de vendre les propriétés canadiennes-japonaises sans le consentement des propriétaires. Entre 1943 et 1947, le gouvernement force la vente de toutes leurs propriétés sur les côtes de la Colombie-Britannique. Pour ceux qui vivent dans les camps d'internement du gouvernement, le Bureau détient tous les revenus de ces ventes. On limite leur accès à ces fonds et on leur remet des allocations minimes. Ces allocations devaient couvrir toutes les dépenses dans les camps d'internement.

La nouvelle de ces ventes forcées est source de doutes, puis de colère chez ceux qui ont perdu tout ce qu’ils ont bâti.

Transcription

[Une gravure sur bois japonais montre deux voiliers flottant près de petites îles près de rapides agitées. L’image se transforme en sa forme réelle.]

24 février 1945

[Une jeune femme lit :]

Vous m’avez informé que ma propriété, et mes biens personnels ont été vendus. Comme vous le savez, je n’ai jamais consenti à la vente, mais je me suis opposé en tout temps et encore maintenant à la vente de ma dite propriété.

[La femme s’assoit dans un bâtiment d’un chantier naval.]

Cependant je suis en détresse, car mes revenus actuels ne sont pas suffisants pour soutenir ma famille en raison du temps non favorable pour l’exploitation forestière ici.

[Elle se lève dans un ancien atelier d’usinage.]

Je vous demande maintenant de me faire parvenir 50 $ de mon fonds chaque mois afin de subvenir à mes besoins et à ceux de ma famille,

[Des chutes d’eau apparaissent.]

j’aimerais être clair que je l'accepte seulement sous protêt, survenant de ce que je considère la vente et la cession injustifiées de ma propriété.

Le besoin de fond est urgent, ça serait apprécié si vous veuillez le parvenir immédiatement.

[Assis sur la rampe de bateau du champ naval, la jeune femme parle :]

Mon nom est Laura Fukumoto, et cette lettre était écrite par mon arrière-grand-père, Toyemon Fukumoto.

[Elle sourit et regarde l’eau doucement clapoter la rampe en bois.]

Transcription

[Musique de piano atmosphérique]

[Une gravure sur bois japonaise montre un nouveau village côtier avec une forêt en montagne derrière. Des villageois japonais tenant des parasols traversent un pont piéton en bois. La scène se transforme en la même côte littorale actuelle, ou tout ce qui reste est du bois empilé en décomposition dans de l’eau peu profonde.]

>> Voix d’homme :

Monsieur,
Dans votre lettre, vous déclarez que vous ne pouvez pas faire suite à ma demande de vendre ma propre propriété à qui je veux.

[Un homme est debout dans un bâtiment d’un chantier naval abandonné, regardant par la fenêtre.]

>> L’homme assis lit d’une feuille :

Vous avez déclaré qu’il est maintenant impossible pour vous de tenir compte de la vente à M. Bruce McCurrach, parce que la vente de ma propriété, ainsi que d’autres propriétés rurales, a été faite au directeur, Loi sur les terres destinées aux anciens combattants.

>> L’homme parle :

Après lecture de votre lettre du 30 août 1943, je comprends que la transaction a eu lieu le 1er janvier 1943, exactement un an et quatre mois passés,

>> L’homme parle :

mais à ce jour, vous ne m’avez pas donné le prix de vente de ma propriété, que vous avez vendue sans mon consentement.

[Alors que le soleil brille doucement par les vieilles fenêtres, Brent est debout dans un atelier. Des vieux piliers en bois passant lentement sur la surface de l’eau de la côte, s’étirant haut, comme les branches d’un arbre submergé sous la surface lisse de l’eau. Des nuages hauts remplissent le ciel bleu au-delà des montagnes.]

Même pour les propriétés vendues en vertu de la loi sur l’expropriation, le propriétaire a le droit de faire appel pour un prix de vente équitable. Vous m’avez avisé que vous avez vendu ma propriété, mais vous ne savez pas le prix de vente.

[L’homme glisse ouverte une porte menant au quai dehors.]

J’avais l’impression que votre bureau était là pour veiller aux intérêts des Japonais. Du moins, c’est ce que vous m’avez dit au moment de l’enregistrement de ma propriété.

>> L’homme lève la tête et continue sa narration :

Veuillez agréer mes salutations distinguées,
Tokuji Hirose

>> L’homme parle :

Mon nom est Brent Hirose. Cette lettre a été écrite par mon arrière-grand-père Tokuji Hirose, à Winnipeg, Manitoba – où ma famille vit toujours aujourd’hui.

[Portant un chandail foncé, Brent est debout dans le bâtiment d’un chantier naval avec le soleil qui entre par l’espace entre les planches de bois du mur derrière lui.]

La vente non autorisée de leurs biens est source de misère – des années de travail disparaissent après un simple coup de crayon.

Transcription

[Musique de piano atmosphérique]

[Un pont terrestre s’étirant à travers une plaine plate et gazonnée à la base de plusieurs montagnes apparaît. Deux ornières créent un chemin à ses côtés. Les marais autour sont représentés en gravures sur bois. Puis, une image actuelle et réelle de la scène remplace les gravures, avec de l’eau entourant le passage usé et recouvert de gazon traversant les marais. La vue aérienne de la scène défile.]

>> Voix d’homme :

Monsieur,

Le directeur du Bureau du séquestre à Vancouver nous a avisés de votre politique de liquidation des biens japonais.

>> L’homme parle :

En raison de cette politique, ma propriété a maintenant été cataloguée pour la vente.

[L’homme qui lit la lettre, portant maintenant des bottes de caoutchouc, marche au long d’un chemin de gravier entouré d’arbres. Des arbres au-dessus créent de l'ombre au sol.]

Cette liquidation va à l'encontre de votre promesse et de mes désirs, elle est en outre totalement injustifiée.

>> L’homme parle :

Mon mari a beaucoup investi dans notre maison et notre jardin. Nous sommes tous les deux fiers de notre collection, non seulement pour sa valeur, mais aussi pour sa belle réponse à nos soins et pour la profonde satisfaction qu'elle nous a procurée.

[L’homme traverse une passerelle arquée au-dessus d’un étang, menant à un jardin japonais. Le gazon vert forme un tapis pour plusieurs variétés de plantes exotiques, incluant l’érable japonais. Des roches lisses sont étalées parmi de petits arbustes.]

Notre collection unique était bien connue et a été largement appréciée par d'autres amateurs.

>> L’homme parle :

Un témoignage de cette appréciation est montré dans la façon dont les gens nous arrêtaient pour nous complimenter lorsqu’ils se promenaient, beaucoup ont demandé la permission de marcher dans notre jardin.

[La flore variée du jardin est à nouveau montrée.]

>> L’homme parle :

Quant à la preuve, lors d'un sondage mené par la Victoria Horticultural Society pour choisir « Les jardins qui embellissent nos rues », M. Takahashi a reçu le Prix du mérite, daté du 16 août 1935.

[Le chemin s’étire jusque dans l’étang du jardin, ou l’homme se trouve debout, avec la passerelle arquée visible de l’autre côté.]

>> L’homme parle :

Deux ans plus tard lors de la visite royale, le roi et la reine sont passés devant notre maison. Nous chérissons le souvenir de voir Sa Majesté tourner la tête pour voir notre jardin.

>> L’homme parle :

Lorsque l'évacuation est devenue une dure réalité, mon mari a reçu de nombreuses offres de pépinières pour acheter notre collection, mais il a refusé.

[L’homme est debout sur de grandes roches plates traversant un petit ruisseau.]

N'aviez-vous pas promis de garder intactes toutes les propriétés jusqu'à notre retour?

>> L’homme parle :

Le jardin n'est-il pas un atout tant pour Victoria que pour nous?

[Une vue plongeante montre le jardin entier de haut, avec la passerelle traversant l’étang en premier plan. Ensuite, l’homme s’assoit vers une des extrémités du pont, tout en regardant une branche d’arbre tordue et recouverte de mousse.]

Mon mari est maintenant trop âgé pour gagner sa vie, sa santé commence à décliner et il a hâte de prendre sa retraite l'année prochaine. Après tous nos efforts de civisme, nous ne méritons pas que notre retraite soit compromise par la vente de nos propriétés.

Veuillez agréer mes salutations distinguées,
Toyo Takahashi Dossier 9363

Mon nom est Dr Bruce Yoneda.

>> Bruce parle :

Cette lettre était écrite par ma grand-mère Toyo Takahashi, dont je me rappelle très bien. Quand j’étais jeune et vivais à Edmonton, nous avons fait plusieurs voyages en famille jusqu’à Toronto pour visiter mes grands-parents.

[Bruce s’assoit dans un vieux bâtiment en bois avec le soleil qui entre par l’espace entre les planches de bois du mur derrière lui. Son regard descend vers la lettre dans ses mains.]

Des Canadiens japonais refusent la minuscule compensation que leur offre le gouvernement pour leurs propriétés.

Transcription

[Musique de piano atmosphérique]

[Une gravure sur bois japonaise montre une rangée de femmes et d’hommes japonais grimpant un sentier côtier en montagne, chargée de quelques biens et paquets. Une image de cette même vue, mais moderne, prend sa place. La forêt se retire, révélant l’océan au-delà des montagnes réfléchissant sur la surface de l’eau.]

>> Voix de femme :

Messieurs,

>> Elle parle :

J’accuse réception de la lettre et du chèque totalisant 48,54 $ pour la vaisselle et les ustensiles de cuisine chez Tairiku Nippo Sha, qui selon vous ont été vendus aux enchères.

[Un sentier serpente à travers une forêt tropicale.]

Je gardais précieusement ces articles et je ne voulais pas les vendre ou je n'ai pas demandé qu’ils soient vendus.

[Une forêt encercle un ruisseau glissant sur des roches lisses.]

C’est la raison pour laquelle j’ai demandé à M. Albert H. Young, l’avocat, de voir s’il pouvait faire quelque chose pour que mes biens me soient retournés. Il y avait 6 boîtes dans lesquelles il y avait 25 ensembles de porcelaine japonaise estimée à 7,00 $ par ensemble ; des articles qui étaient neufs ou pas déballés de la paille d’emballage ; et plusieurs autres qu’on ne peut plus acheter.

Les avez-vous vendus individuellement ou à la boîte? Il n’y a pas de prix de 48,54 $ pour eux.

[Le sentier en forêt apparaît à nouveau.]

J’ai besoin de l’argent maintenant et je vais donc le prendre, mais je ne suis pas satisfait à l’idée que mes biens soient vendus sans m’aviser et de l’argent que vous m’avez envoyé pour eux. Je dépose donc une réclamation à la Commission coopérative quand elle fera sa présentation au gouvernement.

Veuillez agréer mes salutations distinguées, Katsuyoshi Morita

[Une chute d’eau apparaît dans la forêt. La femme regarde vers le haut.]

Mon nom est Emiko Morita. Mon grand-père Katsuyoshi Morita a écrit cette lettre.

[Emiko s’assoit dans un vieux bâtiment en bois avec le soleil qui entre par l’espace entre les planches de bois du mur derrière elle.]

Transcription

[Musique de piano atmosphérique]

[Une gravure sur bois japonaise montre un canal de marée sinueux entouré d’arbres et de souches pourries dans un marais d’eau salée. Une forêt en montagne se trouve derrière. La scène se transforme en vue réelle, avec des nuages brumeux flottant au-dessus du tout.]

>> Voix d’une jeune femme :

Monsieur,
Je suis en possession des articles, de mes accessoires, de mes biens personnels et de marchandises, etc., du magasin et de la résidence à Port Essington vendus par votre bureau.

[La femme aux cheveux foncés est debout, regardant par la fenêtre aux rideaux limpides.]

>> La femme parle :

Votre liste n'est en aucun cas complète, de nombreux éléments manquent, par exemple du magasin et de la résidence de Port Essington :

[Vue de haut, une forêt dense de conifères.]

deux diables
une machine à écrire
deux caisses enregistreuses
cinq tonnes de charbon
dix cordes de bois
trois jumelles, verrouillées dans le coffre-fort,

[La femme est assise dans une petite chambre, regardant par la fenêtre aux rideaux limpides.]

six perruques de costume japonais, quatre kimonos en soie,

>> La femme parle :

quatre kimonos pour homme, un froc et plusieurs accessoires

[Une vue aérienne des marécages gazonnés, où des fragments de bois, des troncs d’arbres et des souches couvrent le paysage.]

>> La femme parle :

De la vaisselle, etc., toute nouvelle, tous les articles vendus à des prix ridicules. Par exemple : une balance Daylon de 425,00 $ pour 50,00 $.

[La femme s’assoit à un bureau, bougeant des carrés en bois.]

De ma maison de Vancouver, au 1864, W. 8e sont disparus :
un lit en bois
un matelas simple
un matelas double

>> La femme parle :

De la maison à North Pacific Cannery :
un matelas double

[La femme s’assoit à une vielle table de couture. Elle arrive pour prendre la roue à coudre.]

une couette
une lampe Coleman
un congélateur à crème glacée
une baignoire
quatre chaises
un diable.

Les articles ci-dessus ne sont pas une liste complète des articles manquants.

Veuillez agréer mes salutations distinguées,
Shimo Kameda
Dossier 1582

[La jeune femme, ses cheveux brunes tenus par un peigne traditionnel, lève les yeux de la lettre.]

Mon nom est Carmel Tanaka et cette lettre a été écrite par mon arrière-grand-mère, Shimo Kameda.

[Carmel baisse la tête vers sa feuille.]

Peinture d'une jeune Canadienne Japonaise derrière des fils barbelés portant un chandail blanc, ciel bleu en arrière plan.

Les protestations des Canadiens japonais sont défaites par le complot gouvernemental. En 1943, ils entament une action en justice pour contester la saisie et la vente forcée de leurs propriétés par le gouvernement. Cependant, ça ne réussit pas.

Transcription

[Musique de piano atmosphérique]

[Un ruisseau de montagne surgit – le bas de l’image est réel, alors que les montagnes apparaissant dans la moitié du haut de l’image sont représentées par des gravures sur bois japonais. L’image réelle remplace les gravures, avec de bas nuages enveloppant la base des montagnes au pics enneigés. Maintenant à l’intérieur, la femme s’assoit dans un bureau, stylo à la main.]

>> Voix de femme :

Messieurs,
J’ai écrit à mon avocat à propos de la vente de ma maison. J’ai entendu dire par des amis à Vancouver que le prix des maisons est bien au-dessus du prix que j’ai mentionné dans ma dernière lettre.

>> La femme parle :

Pourriez-vous donc établir le prix de vente à 1 700 $.

[La femme apparaît dans l’entrée d’une petite maison, son corps n’est qu’une silhouette alors que des rayons de soleil l’inondent. Entrant dans un bureau, elle regarde par la fenêtre. Dehors, une rivière puissante tonne à travers la forêt. De retour dans la pièce, la femme s’assoit à un bureau avec une machine à écrire antique, un crayon posé dans sa main droite au-dessus d’un bloc de papier.]

Veuillez me faire part des résultats.

Je vous remercie.
Veuillez agréer mes salutations distinguées,
E. Nakashima

P.S. En ce qui concerne l’état de compte pour le loyer, je n’en ai pas reçu depuis quelques mois. Veuillez donc les envoyer dans les meilleurs délais. Merci.

Mon nom est Kirsten Emiko McAllister. Je suis l’arrière-petite-fille d’Eikichi Nakashima.

>> Kirsten parle :

Mon arrière-grand-père faisait aussi partie d'un procès contre le gouvernement du Canada en 1943. Lui et trois autres Canadiens japonais contestaient le droit du gouvernement canadien de vendre la propriété des Canadiens japonais.

[Kirsten hoche la tête.]

Le gouvernement répond aux montagnes de lettres d’un langage froid et bureaucratique. En 1947, le gouvernement met en place la Commission Bird pour donner l’impression de répondre aux demandes des Canadiens japonais. La majorité reçoit seulement une petite fraction de la valeur de ce qui a été perdu. Ceci n’est qu’une des batailles quasi insurmontables que les Canadiens japonais continuent à mener malgré la fin de la guerre.

Cher Monsieur
Votre lettre a été placée dans nos fichiers afin que vos commentaires concernant cette vente restent enregistrés, mais nous ne pouvons que vous informer que nous ne sommes pas en mesure d'envisager une alternative à cette affaire. Vos remarques ont été soigneusement lues et nous pouvons comprendre que la disposition de votre propriété sera une question de préoccupation personnelle. Toutefois, la vente des propriétés au directeur, Loi sur les terres destinées aux anciens combattants, a été réalisée dans le cadre d'une politique de liquidation définie par Ottawa sur la base de valeurs estimées.

– Veuillez agréer mes salutations distinguées,
W.E. Anderson,
ministère de l'Agriculture

Photo en noir et blanc de familles japonaises canadiennes qui disent au revoir à travers les fenêtres d'une voiture de train.

Trahison finale

Alors que la guerre tire à sa fin, la vente des propriétés confisquées continue. Les Canadiens japonais dépossédés se font présenter deux choix : déménager à l’est dans les Rocheuses, ou être exilé au Japon. Ils perdent non seulement leurs propriétés et leurs avoirs, mais aussi leur droit de rentrer chez eux.

Vers la fin de la guerre, le gouvernement du Canada déracine les Canadiens japonais une deuxième fois. Ces mesures dépassent des présumées raisons de sécurité en temps de guerre. Les Canadiens japonais ont deux choix : déménager à l’est des Rocheuses, ou être « rapatriés » au Japon, un pays jamais visité par la majorité d’entre eux. Beaucoup ne remettront jamais les pieds sur la côte ouest. Le Canada exile des milliers de ses propres citoyens en 1946.

Image en noir et blanc de canadiennes-japonaises apportant leurs biens dans un camp. Des structures en bois de chaque côté.

Pour ceux qui restent au Canada, les restrictions continuent jusqu’au 1er avril 1949. Ceci est bien différent des Japonais américains, qui ont eu le droit de retourner sur la côte ouest pas plus tard qu’en janvier 1945. Ils ont aussi eu le droit de garder leurs propriétés, à moins de l’avoir vendu eux-mêmes en 1942. Les promesses de la justice britannique ne sont que des paroles vides sous la Loi des mesures de guerre canadienne.

Image en noir et de trois officiers caucasiens debouts derrière une Canadienne Japonaise.