Windsor, Ontario
3426, avenue Whitier
Victoria Colombie-Britannique
562 avenue Dougall,
Windsor, Ont.
27 mars 1944.
Col. [Colonel] Pope
a/s [aux soins de] M. George Alexander,
3426, avenue Whitier,
Victoria C.-B.
COPIE
Monsieur,
J'ai entendu dire par M. Alexander que nos biens seront retirés de notre maison et qu’ils seront vendus plus tard aux enchères.
Il doit y avoir sûrement une erreur terrible quelque part! Je ne peux même pas imaginer une raison possible pour que nos biens soient confisqués.
Ce serait différent si mon père était un ressortissant japonais (un étranger ennemi), mais, si vous prenez la peine de consulter les dossiers, vous constaterez qu'il est un citoyen canadien naturalisé - après avoir obtenu ses papiers vers 1913. Ses papiers de naturalisation ne signifient-ils rien?
Vous constaterez que le statut de citoyenneté de toute la famille est bon aussi. Ni mon père ni ma mère n'ont jamais envoyé d'argent hors de ce pays. Beaucoup de bonnes personnes se porteront garantes de nos références morales.
À l’âge qu’ils ont (mon père a 64 ans cette année et ma mère a 62 ans) - plutôt que d'aller dans une des soi-disant « villes fantômes » pour « vivre du gouvernement » - ils se sont portés volontaires, avec les quatre filles et gendre, pour aller en Alberta pour tenter leur chance dans une ferme de betterave à sucre pour la durée de l’évacuation. Et ce n'était pas une décision facile à prendre pour eux non plus! Mais alors, ils ont pensé qu'ils coopéreraient avec les autorités s'ils le faisaient - s'il vous plaît, ne dites pas qu'ils étaient de trop.
Nous pensions que c'était pour notre protection quand nous avons remis tout au séquestre pour en assurer la garde. Sinon, nous aurions vendu certaines choses nous-mêmes, comme beaucoup le faisaient.
Je n'ai pas eu le cœur de parler aux gens de ce dernier développement. Plutôt que d'envoyer beaucoup de choses dont ils ont besoin pour leur usage quotidien, ils ont soit acheté de nouveaux articles ou s’en sont passé, parce qu'ils avaient hâte de rentrer chez eux dès la fin de la guerre. Ils ne doivent certainement pas être privés de passer les dernières années de leur vie dans leur propre maison!
Veuillez m’écrire dès que possible, car je suis dans un dilemme quant à ce qu'il faut dire aux gens.
Vous remerciant à l'avance, je vous prie d’accepter mes salutations distinguées.
« Macer Okamoto »
(MACER OKAMOTO)
P. S. J'envoie ceci à M. Alexander parce que j'ai égaré l'adresse du bureau du séquestre à Victoria et que je n'ai pas le temps de la chercher maintenant.
« M.O. »